Mise
en scène: Henri Fernandez
Distribution: Henri
Fernandez, Jérôme Mathevon
C’est
au contact renouvelé de la société artistique Viennoise qu’il s’était
juré de fuir il y a trente ans que Thomas Bernhard, spectateur passif
d’un dîner chez les Auersberger, déclenche son intarissable monologue
intérieur.
Dans
ce soliloque fleuve, notre narrateur déplie sa pensée comme un origami
aux mille strates, laissant échapper ça et là, les fulgurances qui
le caractérisent: haine de l’Autriche, dissection du mensonge sous
toutes ses formes, urgence d’écrire - tout est affaire de survie
pour ce personnage joyeusement acariâtre.
Sa soif
de vérité finit par le remettre lui-même en question car au fond,
n’appartient-il pas toujours à cette société artistique qu’il abhorre?
En
bon autrichien, la vocation première de Thomas Bernhard
(1931-1989) fut celle de la musique, mais la tuberculose l'en a
très vite éloigné. Dans son virage vers l'écriture, il conservera
toute sa vie un regret ambigu pour la musique, musique que l'on
retrouve évidement dans sa logorrhée infernale et dans la maîtrise
de ses infatigables variations.
Variations autour de thémes
comme celui de la figure du génie, la maladie; qui ne le quitta
jamais, mais aussi le suicide ; comme parachèvement naturel de toute
existence sans compter toutes les nuances de mauvaise humeur qu'il
décline de l'agacement jusqu'à la haine.
Haine de l'Autriche,
en tout premier lieu, Autriche envers laquelle toute l'entreprise
littéraire de Thomas Bernhard est une inlassable déclaration de
guerre. Le choix de l'écriture plutôt que celui de la musique est
déjà pour lui le choix de la vérité face au mensonge de la culture
Autrichienne dont l'esprit est uniquement tourné vers la musique
et le divertissement.
Loin d'être un
fataliste comme on le pourrait croire, Thomas Bernhard fascine par
l'énergie revigorante qui se dégage de son œuvre, on en sort rechargé.
Donner à entendre le rire tragique de Bernhard aujourd'hui c'est
se réarmer face à la catastrophe, et ; par la force de sa véhémence,
transformer notre impuissance en une source de vitalité.
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